Spontaneous Combustion

Tobe Hooper, U.S.A, 1989, 97 min

Preuve en est de l’inégalité de la filmographie de Tobe Hooper, avec ce « Spontaneous Combustion » qui possédait tout pour devenir culte. En 1982, le cinéaste signe l’un de ses meilleurs films avec le toujours très flippant « Poltergeist », puis en 1985 le un peu gênant « Lifeforce ». Qu’à cela ne tienne, en 1986 il dégaine le délirant, et vraiment fun, « The Texas Chainsaw Massacre 2 », pour en 1989 débarquer avec une œuvre sur la combustion spontanée. Ce dernier tient plus du petit téléfilm inoffensif et un peu raté, que de la grande œuvre cinématographique horrifique.

Le complexe industrialo-militaire au coeur du complot mit à jours dans Spontaneous Combustion.
Alors, ça complote comme vous voulez?

Pourtant porté par le non moins culte Brad Dourif, cette histoire d’un homme qui découvre que ses parents sont morts d’une combustion spontanée juste après avoir servi de cobaye pour l’état, n’est jamais vraiment convaincante. Le scénario s’éparpille en fait dans tous les sens, au point que le récit manque cruellement de cohérence, à mesure que le héros peut maîtriser (plus ou moins) les combustions. Il devient alors capable de foutre le feu aux gens à travers un téléphone, puis de voyager par l’électricité… Ça finit par ressembler à des conventions de Super-héros, sauf que le film à la prétention de délivrer un spectacle censé effrayer.

Entre Tobe Hooper et l’Horreur, le torchon brûle…

« Spontaneous Combustion » constitue une œuvre à contretemps. Il dénonce vraisemblablement la tournure géopolitique guerrière de l’ère Reagan, le retour aux grandes heures de la Guerre Froide, la crainte du nucléaire et l’évolution technologique des armes de destruction massive. C’est une démarche louable, puisque le rôle de l’Horreur au cinéma sert aussi à lancer un regard noir critique envers un monde qui avance à tâtons, et souvent dans la mauvaise direction. Le problème s’avère que le film sort en 1989, le mur de Berlin est sur le point de tomber, l’U.R.S.S est à l’agonie et Reagan laisse sa place à Bush père. La décennie se termine avec de nouvelles préoccupations.

Les parents du héros de Spontaneous Combustion, en flamme juste après sa naissance.
Il faut accorder au film la réussite de certains effets grandiloquents.

Le métrage de Tobe Hooper aurait certainement été pertinent quatre ou cinq ans en amont, alors que les États-Unis traversaient un plein revival des fifties. Tout ici dans l’esthétique, comme dans la construction du récit et les thématiques traitées, fait daté, quand le film résonne probablement avec la catastrophe de Tchernobyl, trois ans plus tôt. Le problème majeur est que ce dont parle le métrage et la manière dont il l’aborde, et bien ça a été fait en mieux avant…

Intentions louables pour film du jeudi soir

Comme pour « Lifeforce », il y a en sous-texte un message écologique qui en cette fin d’année 1980 peut aujourd’hui paraître novateur. Il ne faut cependant pas oublier que ces craintes apparaissent à Hollywood dans les années 1970 et que les grands films catastrophico-écolos datent de cette décennie. « Spontaneous Combustion » pourrait ainsi servir de prolongement à ces thèmes, afin de les renouveler, mais le truc c’est que tout est tellement cheap dans ce film, que le message passe complètement à côté de sa cible.

Brad Dourif tout en fumé, joue énormément dans l'intérêt de revoir Spontaneous Combustion.
La prestation du toujours inquiétant Brad Dourif, joue beaucoup contre l’oublie du film

Sur même pas 1 h 40, ce qu’il en résulte, c’est la descente aux enfers d’un universitaire bien sous tout rapport, qui de type un peu mou devient une créature infernale, en deux temps trois mouvements. Le film prend rapidement la forme d’une enquête, dont l’originalité nous pète à la gueule : le gouvernement ment, le scientifique fou tue pour sauver l’humanité et tout un système d’espionnage est mis à jour… Il se veut rempli de rebondissements, mais tout est beaucoup trop convenu, et encore une fois, vu en mieux ailleurs dans les années 1970. Le résultat s’en révèle juste être une grosse boursouflure techno-horrifique.

Une combustion pas si spontanée

Sans mauvais jeu de mots (mais un peu quand même), le film se consume sur lui-même, se faisant de plus en plus ennuyeux, exactement là où il devrait se montrer de plus en plus passionnant. Les minutes passent et c’est un échec supplémentaire, pour Tobe Hooper, qui se dessine. Alors, avec le temps le métrage gagne un petit peu plus de charme. Voir des acteurices jouer à fond la carte de la crédulité (ce sont bien les seuls…) avec un sérieux et un premier degré qui manque au cinéma d’aujourd’hui, c’est toujours plaisant. Mais c’est une bien faible récompense, il faut l’admettre.

John Landis qui crache du feu, dans un petit cameo de Spontaneous Combustion.
Cameo de John Landis, venu faire un petit coucou sur le tournage de son copain Tobe

Attendu, prévisible, anachronique et terriblement peu original, « Spontaneous Combustion » ne présente plus tellement d’intérêt aujourd’hui. Il lui reste le fait qu’il fait partie de la filmographie d’un cinéaste sympathique et malchanceux, et dans cette optique il demeure un objet de cinéma toujours intéressant à revoir. Au-delà des productions de Tobe Hooper, il n’est juste qu’un petit produit d’exploitation, une énième tentative de surfer sur les peurs et les craintes de ses contemporains. Le problème s’avère qu’en 1989 les Étatsuniens, comme les Occidentaux en général, ne semblent plus aussi inquiets après s’être fait laver le cerveau activement pendant toutes les années 1980.

Pour en Savoir Plus

Spontaneous Combustion sur IMDB

Bande Annonce

Forgé par le gore et l'horreur déviante, amateur de Slasher depuis sa plus tendre enfance, Stork est toujours là où on l'attend : devant un film, muni de sa plume et prêt à suriner le moindre métrage...

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