Anthony Hickox, U.S.A, 1989, 104 min
Les séries B horrifiques des années 1980 au cinéma ont cela de bien, c’est qu’elles expérimentaient beaucoup. « Sundown – The Vampire in Retreat » n’échappe ainsi pas à la règle, et a pour ambition de dépoussiérer (façon de parler, car l’action se passe dans le désert…) le mythe du Vampire. Arrivé sur la fin de la décennie, le film d’Anthony Hickox possède encore bien ce charme désuet des films d’Horreur de la période. De plus, son ton léger fait baigner davantage le récit dans la comédie. Néanmoins, la qualité de ce petit métrage, c’est qu’il essaye aussi de se prendre au sérieux.
Le concept farfelu met en lumière (hi hi) la dernière communauté de vampire, installée au fin fond du désert étatsunien. Grâce à l’invention d’une crème solaire très puissante et des verres teintés, ils peuvent ainsi se balader librement en plein jour. Le problème c’est qu’ils sont très retirés, et la nourriture se met à manquer, puisque de moins en moins de touristes viennent se perdre dans leur trou paumé. Jusqu’au jour où un scientifique, qui pourrait leur produire du sang de synthèse, arrive par hasard dans la ville.
La fin d’une époque racontée dans un film sorti à la fin d’une époque.
« Sundown – The Vampire in Retreat » arrive vraiment à la fin d’une époque, à tel point que le studio derrière, Vestron Pictures, cessera son activité juste après le flop du film. Bon, la compagnie semblait déjà mal en point, mais un échec supplémentaire à trois millions de dollars, ça n’aide pas. Cela témoigne surtout des changements structurels à Hollywood à l’orée des années 1990, où même les Majors, qui règnent en maître sur la production, sont rachetées de toute part. Alors forcément, dans le business de la série B horrifique, cela ne fait pas de cadeau.
Il est amusant de constater, avec le recul, que le film d’Hickox se montre plus pertinent qu’il ne peut y paraître, et surtout par rapport à quand il est sorti. Le récit conte la fin d’une époque, celle des vampires gothiques, dans leurs châteaux, et tout le décorum qui va avec. Ils sont dépassés, dans un monde qui est déjà passé à autre chose. Quand « Sundown » sort, le film d’Horreur made in eighties ne fait plus vraiment recette. En 1989, le top du Box Office est occupé par « Batman », qui reprend de nombreux éléments horrifiques, pour les inclure dans le système mainstream. Ce signe démontre que l’industrie du spectacle est en train de prendre une nouvelle tournure.
Du Western à l’Horreur, il n’y a qu’un colt
Mais là où le film s’avère aujourd’hui génial, c’est que pour témoigner de cela, il prend comme tournure le Western crépusculaire, un genre idéal pour illustrer la fin d’une époque. Nous nous retrouvons ainsi devant une comédie avec des vampires, qui vivent en plein soleil dans le désert, et plus le temps passe et ça devient un Western, avec tout ce que cela implique de conventions et de clichés (sans oublier, bien entendu, de demeurer une œuvre horrifique). Le film est tourné dans le Grand Canyon, lieu emblématique des films de Cow-Boy et le final se clos sur un showdown, dans une référence humoristique au titre. Ça fait un peu bordélique comme ça, et en vrai c’est certainement ce qui a coûté à ce film son entrée dans la postérité, c’est le foutoir.
« Sundown – The Vampire in Retreat » essaye ainsi de convoquer différents univers pour se créer une identité. Bon, ça ne marche pas, mais chaque genre présent dans le métrage est abordé avec un grand respect, et une envie de bien faire qui donne tout son charme au truc. Pour exemple, afin de réaliser le lien entre le Vampire et le Western, il a été fait appel à David Carradine pour jouer le leader de la communauté. Son père, John Carradine, est une figure légendaire du Western, ayant tourné de multiple fois avec John Ford. Mais John Carradine a aussi interprété Dracula (dans le très mauvais « Billy the Kid vs Dracula », déjà un Western avec des vampires). Là se trouve la filiation entre deux pans du cinéma hollywoodien, le Western des 50’s et l’Horreur des 80’s.
Anthony Hickox, du firmament de l’Horreur à la cave de l’Actioner
« Sundown » est mis en scène par Anthony Hickox, dont c’est ici la seconde réalisation, avec le bien mieux réussi « Waxwork » en 1988, qui composait déjà un hommage méta aux classiques de l’Horreur. Hickox réitéra ensuite l’expérience avec « Waxwork 2 » en 1992, avec moins de succès, mais avec un film tout aussi sympa, et particulièrement respectueux d’un Cinéma à l’ancienne. Et puis après l’excellent « Hellraiser III » toujours en 1992 (qui reste d’ailleurs le dernier bon opus de la saga avant le reboot de 2022) il réalisera son ultime film d’Horreur « Warlock » en 1993.
Alors qu’il était promis à un avenir dans le genre, qu’il aurait pu marquer de son empreinte avec ses cinq premières productions devenues cultes, sa carrière prend une nouvelle tournure et s’écroule petit à petit. Son grand coup d’éclat sera certainement « Prince Valiant » en 1997, variation du petit prince de Lu avec un budget hollywoodien. Puis après, il s’est vautré dans des films d’action moisis pour Dolph Lundgren et Steven Seagal, avant de disparaître progressivement des plateaux de cinéma, réapparaissant ici ou là pour un court-métrage ou un épisode de série.
Vous ne pouvez pas rater la performance de Bruce Campbell
Par excès de générosité, parfois, ça donne un peu l’effet inverse du cinéaste qui veut trop en dire et trop en montrer, et ça gave. Il est vrai que « Sundown – The Vampire in Retreat » traduit de temps à autre cette impression. Mais il n’en demeure pas moins dénué de charme, notamment du fait de son casting, qui s’arrache pour faire croire un minimum à cette entreprise. Le jeu over-the-top et les dialogues fromagers, donne en effet tout son caractère à l’ensemble, et pour qui s’avère demandeur, c’est un authentique plaisir de cinéphilie déviante qui vous est proposé.
Vouant un véritable culte à Bruce Campbell (avec un petit autel et des bougies, oui oui), l’auteur de ces lignes est forcé de prendre un détour. Campbell joue ici Van Helsing, un descendant du célèbre chasseur, et il se révèle complètement nul. L’acteur livre alors une prestation mémorable avec cet incompétent chasseur, peu digne de l’héritage de son illustre aïeul. Si c’est toujours un plaisir de retrouver Bruce Campbell, c’est aussi l’assurance de se retrouver face à une série B dans le sens le plus jouissif du terme. C’est à dire, pas un très bon film, mais un excellent moment.
Au final, c’est juste un petit film fun
Malgré son flop retentissant, le film est loin d’être plus mauvais que d’autres du genre, au contraire même, il se permet des audaces qui le rendent encore plus sympathique avec le temps. Inutile d’aller jusqu’à en faire un indispensable de la période, car il y a masse de classique et de production mineures plus importantes à découvrir. Mais comme ça, un samedi soir de creux, au détour d’une pizza, quand les films d’Horreur gritty et déprimant de notre époque ne semblent pas conseillés, il faut admettre que « Sundown », avec son identité bien marquée, demeure une véritable bouffée d’air frais.
Pour en Savoir Plus
Sundown – The Vampire in Retreat sur IMDB
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